

L’alinéa 2 de l’article L.113-1 du Code des assurances dispose que l’assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d’une faute intentionnelle ou dolosive de l’assuré qui font échec au caractère aléatoire d’ordre public du contrat d’assurance.
La faute intentionnelle a été définie par rapport à la faute délictuelle, comme celle qui « suppose la volonté de causer le dommage et pas seulement d’en créer le risque » (Civ. 1ère, 10 avril 1996, 93-14571, publié au Bulletin).
Puis, en l’absence de cette volonté, un arrêt du 25 octobre 2018 a précisé que c’est bien la disparition totale de l’aléa qui caractérise la faute dolosive, avec la « conscience, chez l’assuré, du caractère inéluctable du dommage » (Civ. 2e, 25 octobre 2018, 16-23.103, publié au Bulletin).
Par ailleurs, le paiement d’amendes pénales ou administratives a toujours fait l’objet d’exclusions conventionnelles des polices d’assurance de responsabilité civile professionnelle.
La loi du 30 avril 2025, visant à harmoniser divers textes avec le droit européen, a institué dans le nouvel article 1254 du Code civil une nouvelle exclusion légale.
Aux termes de ce texte, « lorsqu’une personne est reconnue responsable d’un manquement aux obligations légales ou contractuelles afférentes à son activité professionnelle, le juge peut, à la demande du ministère public, devant les juridictions de l’ordre judiciaire, ou du Gouvernement, devant les juridictions de l’ordre administratif, et par une décision spécialement motivée, la condamner au paiement d’une sanction civile, dont le produit est affecté à un fonds consacré au financement des actions de groupe.
La condamnation au paiement de la sanction civile ne peut intervenir que si les conditions suivantes sont remplies :
1° L’auteur du dommage a délibérément commis une faute en vue d’obtenir un gain ou une économie indu ;
2° Le manquement constaté a causé un ou plusieurs dommages à plusieurs personnes physiques ou morales placées dans une situation similaire.
Le montant de la sanction est proportionné à la gravité de la faute commise et au profit que l’auteur de la faute en a retiré. Si celui-ci est une personne physique, ce montant ne peut être supérieur au double du profit réalisé. Si l’auteur est une personne morale, ce montant ne peut être supérieur au quintuple du montant du profit réalisé.
Lorsqu’une sanction civile est susceptible d’être cumulée avec une amende administrative ou pénale infligée en raison des mêmes faits à l’auteur du manquement, le montant global des amendes prononcées ne dépasse pas le maximum légal le plus élevé.
Le risque d’une condamnation à la sanction civile n’est pas assurable ».
Cette disposition concerne essentiellement le risque d’entreprise, tel le régime de la responsabilité des producteurs du fait de produits défectueux, lorsque ceux-ci mettent sciemment sur le marché des produits ou effectuent des prestations susceptibles de constituer un danger pour des personnes physiques, et notamment des consommateurs, dans le but de réaliser un profit.
Mais elle serait applicable à tout professionnel ayant agi dans un but lucratif, notamment à un médecin ayant réalisé des interventions inutiles, ou un conseiller financier ayant préconisé des opérations de défiscalisation risquées à sa clientèle.
Le montant de la sanction civile sera proportionnel à la gravité de la faute commise et au profit que l’auteur de la faute en a retiré, avec un plafond. Il appartiendra donc au juge de se livrer à une appréciation subjective de la gravité de la faute commise, et à l’évaluation du profit réalisé.
Elle sera cumulable avec les amendes pénales prononcées pour les délits, notamment de Mise en danger d’autrui (CP, art. 223-1), atteintes involontaires à l’intégrité physique ou à la vie (CP, art. 222-19, 222-20 et 221-6), ou tromperie aggravée (CP, art. L441-1).
Mais la sanction civile sérielle de l’article 1254 fondée sur la recherche d’un profit ne suppose pas que son auteur ait nécessairement eu la volonté de causer le dommage lui-même « tel qu’il est survenu » ou qu’il ait eu la « conscience de son caractère inéluctable ».
Dès lors, seule la prise en charge de cette sanction civile serait inassurable, mais non l’indemnisation des victimes des dommages par l’assureur responsabilité civile de l’auteur du dommage.