

Civ. 3e, 27 novembre 2025, 23-20.727, publié au Bulletin
Des maîtres de l’ouvrage ont confié à un maître d’œuvre la construction d’une maison d’habitation.
Les maîtres de l’ouvrage ont ensuite sollicité la résiliation de ce contrat, en faisant valoir que l’implantation prévue n’était pas réalisable, et ont assigné le maître d’œuvre en référé en sollicitant une mesure de consultation sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile, avec une mission déterminée.
Faisant droit au principe de la demande, le juge des référés a néanmoins ordonné une mesure d’expertise judiciaire, avec une mission beaucoup plus large que celle d’une simple consultation.
Le maître d’œuvre a contesté cette décision au motif que le juge aurait modifié l’objet du litige et, partant, violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. en ordonnant une expertise judiciaire au lieu de la consultation demandée.
La Cour de cassation valide cependant la décision du juge aux motifs que :
Il résulte des articles 145 et suivants et 232 et suivants du code de procédure civile que ne modifie pas l’objet du litige le juge des référés qui, saisi sur le fondement du premier de ces textes, d’une demande de désignation d’un technicien en vue d’une mission de consultation, après avoir constaté le motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, commet un technicien avec une mission d’expertise au motif, souverainement apprécié, que, l’issue du litige requérant des investigations complexes, la mesure de consultation sollicitée ne serait pas suffisante.
Note :
Il est très fréquent que tout en faisant droit au principe d’une demande de mesure d’instruction le juge modifie le contenu de la mission sollicité, en reprenant les termes des propres modèles de missions qu’il ordonne habituellement pour un type de litige déterminé, tels qu’en construction ou matière médicale.
Un tel procédé a pour but d’assurer l’efficacité de la mesure d’instruction, laquelle est destinée à éclairer un juge, lorsque la mission d’expertise lui apparaît insuffisante ou imprécise, et le contenu de la mission ordonnée peut donc être différent de celui-ci sollicité par les demandeurs éventuellement en accord avec les défendeurs.
La Cour de cassation valide donc expressément une telle pratique du juge, la modification de la mission sollicitée ne modifiant pas les prétentions des parties...
Dans la mesure où des parties sont d’accord pour que la mission d’un expert judiciaire soit circonscrite à des points déterminés, et éviter ainsi des investigations inutiles et un enchérissement de leur coût, elles ont la possibilité de convenir d’une mesure d’instruction dans le cadre d’une mesure d’instruction simplifiée ou d’une procédure participative (C. Proc. Civ. art. 131).
L’article 131-8 nouveau du code de procédure civile prévoit que lorsque la convention est conclue entre avocats, le rapport remis aux parties a la même valeur que l’avis rendu dans le cadre d’une mesure judiciairement ordonnée.
Toutefois, s’il s’avère nécessaire de mettre ultérieurement en cause un tiers au cours des opérations d’expertise, celles-ci ne lui seront opposables que s’il donne son accord pour y participer puisque ce tiers n’est pas partie à la convention de désignation…
