

Civ. 3e, 5 juin 2025, 23-23.775, publié au Bulletin
Il résulte de l’article 1240 du code civil que, si la victime n’est pas tenue de limiter son préjudice dans l’intérêt du responsable, sa faute, lorsqu’elle a contribué à l’aggravation du dommage, diminue son droit à réparation.
Ainsi, un partage de responsabilité peut être prononcé entre l’auteur d’une pollution, ayant provoqué une surmortalité des bovins d’un éleveur voisin, et la victime qui avait laisser pâturer son cheptel sur des parcelles qu’elle savait polluées pendant plusieurs années, alors qu’elle disposait d’autres parcelles non polluées pouvant accueillir les bêtes, ce qui constitue un comportement fautif en lien avec la persistance de cette surmortalité
Cette décision parait contraire au principe selon lequel « la victime n’est pas tenue de minimiser son préjudice au profit de l’obligé à réparation » (Civ. 2e, 5 mars 2020, 18-25.981– Civ. 2e, 19 juin 2003, 00-22.302, publié au Bulletin – Civ. 2e, 19 juin 2003, n°01-13.289, publié au Bulletin ).
En matière de responsabilité extracontractuelle, la Cour de cassation a affirmé, sur la base du principe de la réparation intégrale des préjudices, que « l’auteur d’un dommage doit en réparer toutes les conséquences » et que « la victime n’est pas tenue de limiter son préjudice dans l’intérêt du responsable » (Civ. 2e, 26 mars 2015, 14-16.011, publié au Bulletin).
Ainsi, ” le refus d’une personne, victime d’une infraction pénale, de se soumettre à des traitements médicaux qui ne peuvent être pratiqués sans son consentement ne peut entraîner la perte ou la diminution de son droit à indemnisation de l’intégralité des préjudices résultant de l’infraction (…) alors que l’auteur d’un accident doit en réparer toutes les conséquences dommageables ; que la victime n’est pas tenue de limiter son préjudice dans l’intérêt du responsable… » (Crim, 27 septembre 2016, 15-83.309, publié au Bulletin).
De même en matière de responsabilité contractuelle, « l’auteur d’un dommage doit en réparer toutes les conséquences et la victime n’est pas tenue de limiter son préjudice dans l’intérêt du responsable » (Civ. 3e, 10 juillet 2013, n°12-13.851 (défaut de mesures conservatoires) ; Civ. 3e, 20 mai 2021, n°20-10.905(Perte de loyer commercial) – Civ. 2e, 2 juillet 2014, 13-17.599, publié au Bulletin (Responsabilité notariale))
Toutefois, certaines décisions avaient déjà admis que la faute de la victime puisse limiter son indemnisation, dans la mesure où celle-ci a contribué à l’aggravation de son préjudice ( Civ. 1re, 2 octobre 2013, n°12-19.887 (inertie de la victime pour défaut de remise en service) – Civ. 2e, 24 novembre 2011, 10.25.635, publié au Bulletin (Défaut d’utilisation d’un véhicule)).
Le projet de réforme de la responsabilité civile envisage que “les dommages et intérêts peuvent être réduits lorsque la victime n’a pas pris les mesures sûres, raisonnables et proportionnées, notamment au regard de ses facultés contributives, propres à éviter l’aggravation de son préjudice” (C. Civ. Art. 1264).